• Au moins 196 défenseurs des droits fonciers et environnementaux ont été tués en 2023 à travers le monde, d’après un nouveau rapport publié aujourd’hui par Global Witness.
  • Les nouveaux chiffres portent à 2 106 le nombre total de défenseurs tués entre 2012 et 2023.
  • Pour la seconde année consécutive, c’est la Colombie qui enregistre le plus grand nombre de meurtres – 79 défenseurs y ont été tués l’année dernière, un record, suivi du Brésil (25), du Mexique (18) et du Honduras (18).
  • Une fois de plus, c’est en Amérique latine que les meurtres sont les plus nombreux, à savoir 166 au total sur la région – 54 au Mexique et en Amérique centrale, et 112 en Amérique du Sud. 
  • Par ailleurs, les défenseurs des droits environnementaux sont de plus en plus souvent visés par différentes tactiques pour faire taire ceux d’entre eux qui s’expriment pour la défense de la planète en Asie, au Royaume-Uni, dans l’Union européenne et aux États-Unis. 

Londres, le mardi 10 septembre 2024 – Au moins 196 défenseurs des droits fonciers et environnementaux ont été tués l’année dernière pour avoir tenté de protéger la planète, d’après un nouveau rapport de Global Witness publié aujourd’hui en collaboration avec des partenaires globaux. Les nouveaux chiffres portent à 2 106 le nombre total de défenseurs tués entre 2012 et 2023.

Globalement, le rapport révèle que la Colombie est le pays le plus meurtrier au monde, avec 79 morts l’année dernière – contre 60 en 2022 et 33 en 2021. Il s’agit là du plus grand nombre de défenseurs tués dans un seul pays sur une seule année jamais enregistré par Global Witness. Déplorant 461 meurtres de 2012 à 2023, la Colombie affiche le plus grand nombre jamais recensé de meurtres signalés de défenseurs environnementaux.

Parmi les autres pays d’Amérique latine où les meurtres sont nombreux figurent le Brésil, avec 25 meurtres l’année dernière, et le Mexique et le Honduras, avec 18 meurtres chacun.

L’Amérique centrale ressort comme l’un des endroits les plus dangereux au monde pour les défenseurs. Le Honduras, où 18 défenseurs ont été tués, enregistre le nombre le plus élevé de meurtres par habitant en 2023. En outre, dix défenseurs ont été tués au Nicaragua l’an passé, quatre au Guatemala et quatre au Panama.

À l’échelle mondiale, les peuples autochtones et afrodescendants continuent d’être ciblés de manière disproportionnée, représentant 49 % des personnes tuées.

Laura Furones, auteure principale et conseillère principale de la campagne consacrée aux défenseurs des droits fonciers et environnementaux à Global Witness, a déclaré :

« À l’heure où la crise climatique s’accélère, ceux qui élèvent la voix pour défendre notre planète avec courage sont confrontés à de la violence, à des mesures d’intimidation et à des meurtres. Nos données montrent que le nombre de meurtres se situe toujours à un niveau alarmant, ce qui est tout à fait inacceptable.

Les gouvernements ne sauraient rester les bras croisés ; il faut qu’ils prennent des mesures décisives pour protéger les défenseurs et s’attaquer aux moteurs sous-jacents de la violence à laquelle ils font face. Les militants et leurs communautés jouent un rôle essentiel dans les efforts visant à empêcher et réparer les dommages causés par les industries néfastes pour le climat. Nous ne pouvons pas nous permettre, et nous ne saurions tolérer, de perdre encore des vies. »

S’il reste difficile d’établir un lien direct entre le meurtre d’un défenseur et les intérêts spécifiques des entreprises, Global Witness a identifié l’industrie minière comme étant de loin le plus important moteur parmi tous les secteurs, 25 défenseurs ayant été tués après s’être opposés à des opérations minières en 2023. Parmi les autres secteurs, citons la pêche (5), l’exploitation forestière (5), l’agrobusiness (4), les routes et infrastructures (4) et l’énergie hydroélectrique (2).

En tout, 23 des 25 meurtres liés au secteur minier commis l’année dernière à travers le monde ont eu lieu en Amérique latine. Notons toutefois que plus de 40 % de l’ensemble des meurtres liés au secteur minier entre 2012 et 2023 se sont produits en Asie – où se trouvent d’importantes réserves naturelles de certains des principaux minerais cruciaux pour les technologies de l’énergie propre.

Outre la dénonciation du nombre de meurtres à travers le monde, le rapport de Global Witness fait ressortir des tendances plus générales ayant trait à des attaques non meurtrières et leurs impacts néfastes sur les communautés. Il met en exergue des cas de disparitions forcées et d’enlèvements, montrant du doigt certaines stratégies employées aux Philippines et au Mexique en particulier, ainsi que le recours plus généralisé de la criminalisation en tant que tactique pour faire taire les militants à travers le monde.

Le rapport étudie aussi la répression dont font l’objet les militants environnementaux au Royaume-Uni, en Europe et aux États-Unis, où la législation est de plus en plus employée comme une arme contre les défenseurs, et où des peines sévères sont plus fréquemment imposées aux individus impliqués dans les manifestations pour la défense du climat. Le rapport confirme l’apparition d’une tendance inquiétante de cas de criminalisation à travers le monde.

Jonila Castro, militante philippine enlevée par l’armée de son pays en 2023 et qui fait actuellement face à des mesures de criminalisation, dont il est question dans le rapport, a déclaré :

« Même à notre libération après notre enlèvement, les menaces ont continué. Nous éprouvons des difficultés à rentrer chez nous et dans nos communautés. Nous continuons de faire l’objet de surveillance, de mesures d’intimidation et d’être affublés de ‘l’étiquette rouge’. Les attaques destinées à faire taire les défenseurs environnementaux mettent à mal notre plaidoyer visant la protection de l’environnement et des droits des populations.

La dévastation environnementale et les atteintes aux droits humains sont des phénomènes liés, tous les deux appuyés par les gouvernements et les systèmes extractifs qu’ils défendent. Notre expérience souligne combien il est urgent de renforcer la protection et la reconnaissance des militants communautaires et des défenseurs environnementaux dans la lutte globale pour une justice climatique. »

Malgré l’aggravation de la crise climatique – et en dépit de l’objectif des 1,5 °C pris par les gouvernements au titre de l’Accord de Paris –, les défenseurs des droits fonciers et environnementaux font l’objet d’un nombre croissant d’attaques visant à stopper leurs travaux de protection de la planète. Au moins 1 500 défenseurs ont été tués depuis l’adoption de l’Accord de Paris le 12 décembre 2015.

Nonhle Mbuthuma, auteure de la préface du rapport et lauréate du prix Goldman pour l’environnement 2024, a déclaré :

« Dans tous les coins du globe, ceux qui osent exposer l’impact ravageur des industries extractives—déforestation, pollution et accaparement des terres—sont confrontés à des mesures d’intimidation et à de la violence. Cela vaut en particulier pour les peuples autochtones, qui sont essentiels pour la lutte contre le changement climatique et qui, pourtant, sont ciblés de manière disproportionnée année après année.

La brutalité de ces attaques révèle toutefois quelque chose de profond : le pouvoir exercé par ces individus ordinaires lorsqu’ils s’unissent pour la justice. Les dirigeants ont pour devoir d’écouter les défenseurs des droits fonciers et environnementaux et de leur permettre de s’exprimer, où qu’ils soient, sans peur de représailles. Ce devoir incombe à chaque nation à revenu élevé et riche en ressources à travers le monde. »