Plus de 750 millions de dollars de recettes minières versés par des entreprises à des organismes étatiques en République démocratique du Congo ont échappé au Trésor public entre 2013 et 2015.
Ces sommes se sont évaporées dans une société minière dysfonctionnelle détenue par l’État et des administrations fiscales nationales opaques.
Personne ne sait comment ces fonds ont été dépensés ou où ils ont atterri. Cependant, des témoignages et des documents recueillis par Global Witness laissent penser qu’une partie au moins a été redistribuée au sein d’un réseau de personnes corrompues entretenant des liens avec le régime du président Joseph Kabila.
Les principaux coupables
La Gécamines, l’entreprise minière d’État, et des administrations fiscales nationales
La conjugaison délétère de la corruption et d’une mauvaise gestion de la
part des agences fiscales et des entreprises minières publiques du Congo
détourne un cinquième des recettes minières du budget de l’État, alors que ces
sommes devraient servir à financer des services publics essentiels tels que les
écoles, les hôpitaux et les routes.
Depuis 2012, nous avons révélé comment le Congo a perdu 1,4 milliard de dollars suite à une série d’accords miniers opaques conclus avec des entreprises offshore. Notre nouveau rapport a pour but de révéler l’autre partie de cette histoire. Il montre en effet que des sommes considérables s’évaporent également à l’intérieur des frontières du Congo en raison de la corruption et d’un système fiscal inefficace.
Notre enquête détaille comment la Gécamines détourne de l’argent au travers de transactions suspectes (parfois plusieurs millions de dollars en liquide) tout en se soustrayant à toute contribution importante au Trésor public congolais ou à tout investissement dans ses propres opérations minières. L’entreprise a plus d’un milliard de dollars de dettes et n’a quasiment plus d’activités extractives, alors qu’elle produisait autrefois jusqu’à 500 000 tonnes de minerais par an.
La Gécamines était la vache laitière de tout le pays… [Mais aujourd’hui], la société est devenue une vache maigre, qui n’a plus de lait pour nourrir tous ses enfants. - Raymond, un ouvrier de la Gécamines depuis les années 1980
Les administrations fiscales congolaises sont aussi coupables. Peu transparentes, elles sont souvent dirigées par des personnalités puissantes entretenant des liens personnels ou professionnels avec le bureau du Premier ministre ou avec la présidence. Chaque année, les agences fiscales nationales retiennent une partie des recettes fiscales découlant des activités minières en « fonds propres » au lieu de les verser au Trésor public. La loi autorise ces administrations à appliquer des amendes à des entreprises pour toute violation du code minier et à conserver une partie des sommes perçues, qui peuvent parfois atteindre des centaines de millions de dollars.
Le paradoxe de la pauvreté et de l’abondance
Le Congo est le premier producteur de cuivre d’Afrique ainsi que le premier fournisseur au monde de cobalt, un élément qui est utilisé pour la fabrication des batteries au lithium-ion des voitures électriques. Pourtant, il s’agit également de l’un des pays les plus pauvres au monde.
Non loin du centre de Kinshasa, la capitale animée du Congo, certaines familles mangent rarement plus d’un repas par jour. Juste à côté des communautés vivant dans le dénuement le plus total, dans la région du Katanga, il existe d’immenses mines industrielles détenues et gérées par des entreprises qui comptent parmi les plus riches au monde.
Il est temps de combler le fossé dans le système de perception des impôts et de faire en sorte qu’une plus grande partie des revenus miniers soit reversée au Trésor public. Après une baisse de deux ans, les prix du cuivre sont en train de connaître un rebond vigoureux et le cobalt traverse une véritable flambée des prix. La hausse des prix du cuivre et du cobalt ainsi que l’explosion récente de la production pourraient redynamiser l’économie congolaise.
Le pays et sa population ne peuvent pas se permettre de passer à côté de cette opportunité.
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