Depuis vingt ans, l’est du Congo est le théâtre d’un violent conflit. Au cours de cette période, des millions de personnes ont perdu la vie inutilement. Même si la situation est complexe, il ressort que ce conflit a été en partie alimenté par le contrôle de ressources naturelles lucratives.
Global Witness a été l’une des premières organisations à exposer le lien entre le commerce international des minerais et les groupes armés du Congo et à faire pression pour que des solutions soient mises en place.
En 2010, une loi historique a été adoptée par le Congrès américain ; elle exige que les sociétés cotées en bourse aux États-Unis déterminent si leurs produits contiennent un ou plusieurs de ces quatre minerais - l’étain, le tantale, le tungstène et l’or – provenant de la RDC ou de l’un de ses neuf pays limitrophes.
La Section 1502 de la loi américaine Dodd Frank, connue sous le nom de disposition sur les minerais des conflits, est le premier texte de loi visant à briser les liens entre le commerce lucratif des minerais de l’est du Congo et les groupes armés auteurs d’exactions.
Elle oblige les sociétés cotées en bourse aux États-Unis qui croient s’approvisionner en matières provenant de cette région d’opérer des contrôles sur leurs chaînes d’approvisionnement, c’est-à-dire d’exercer un devoir de diligence, afin de déterminer si leurs achats de minerais ont bénéficié à des groupes armés impliqués dans des exactions.
Les entreprises doivent alors soumettre un rapport public à l’organisme américain de réglementation des marchés financiers, la Security and Exchange Commission (SEC), à propos des mesures qu’elles ont prises.
La date limite fixée par la loi pour la présentation de la première série de rapports de sociétés était le 31 mai 2014.
La résistance des entreprises face aux règles de transparence
La Section 1502 est l’un des textes de loi les plus importants relatifs à la transparence dans les chaînes d’approvisionnement des entreprises américaines et elle n’est pas demeurée sans contestation.
En octobre 2012, la Chambre de Commerce américaine, la National Association of Manufacturers (NAM, Association nationale des fabricants) et la Business Roundtable – trois des plus grands groupes industriels américains et principaux opposants à cette loi novatrice – ont intenté une action en justice contre la SEC.
Cette action en justice contestait la réglementation finale du régulateur qui fixe les modalités d’application de la loi par les entreprises. Global Witness s’est beaucoup investi sur cette question et a présenté plusieurs notes d’information en tant qu’amicus curiae pour soutenir la réglementation de la SEC. En juillet 2013, le Tribunal de District de Washington D.C. a statué à l’encontre des groupes industriels, jugeant que leurs arguments étaient « dénués de fondement » et que certaines de leurs préoccupations concernant l’effet de la loi sur les entreprises étaient « exagérées ».
Les groupes industriels ont interjeté appel en 2014, mais la réglementation a en grande partie été maintenue.
Néanmoins, dans un arrêt regrettable et décevant, la Cour d’appel a établi qu’en obligeant les sociétés émettrices à décrire leurs produits comme « n’étant pas considérés exempts de tout lien avec le conflit en RDC », la réglementation les forçait à faire une déclaration sous la contrainte, en violation du droit à la liberté d’expression consacré par le Premier Amendement. La procédure a été rouverte et cette décision est actuellement réexaminée. Dans le cadre de ce nouvel examen, Global Witness a soumis ses arguments à la cour en décembre 2014, expliquant de façon circonstanciée que les entreprises ne jouissent pas d’un droit constitutionnel leur permettant de dissimuler des informations à propos de la présence de minerais des conflits dans leurs produits.
La Section 1502 de la loi Dodd Frank a contribué à catalyser les réformes au Congo, en Europe et en Chine, et elle encourage les groupes industriels à créer des programmes novateurs « exempts de tout lien avec un conflit ». Tout ceci pourrait être mis en péril si la loi venait à être affaiblie.
Les entreprises américaines ont elles un droit constitutionnel à dissimuler des informations sur les minerais du conflit ? Plus d’information sur le procès ici.
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