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Le Parlement congolais devrait suspendre l’adoption d’un projet de loi sur les hydrocarbures controversé et y ajouter des mesures fondamentales pour empêcher la corruption et le forage dans l’un des parcs nationaux les plus importants du monde, a affirmé Global Witness aujourd’hui.
La loi sur les hydrocarbures, telle qu’elle se présente à l’heure actuelle, créerait un système opaque d’attribution de droits pétroliers et ne rendrait pas obligatoire la publication des contrats pétroliers ou l’identité des propriétaires réels ou « effectifs » des licences pétrolières. Cela augmenterait les risques de corruption dans le secteur. En outre, cette loi ouvre la porte au forage dans les parcs nationaux et les sites du patrimoine mondial du Congo. [1]
Global Witness demande instamment aux autorités congolaises d’ouvrir le projet de loi à une consultation publique, comme elles l’ont fait avec la révision du code minier du pays. En effet, le gouvernement congolais discute actuellement du code minier avec la société civile et le secteur privé, alors qu’aucune consultation publique de ce type n’a été menée concernant la loi sur les hydrocarbures, et ce, malgré la contribution qu’apportent les recettes pétrolières au budget national. D’après les prévisions, cette contribution est appelée à augmenter considérablement dans un proche avenir suite à la signature récente d’un accord avec l’Angola relatif à l’exploitation de gisements offshore.
« La contribution des recettes pétrolières représente plus de 325 millions $ par an pour l’État congolais, et ce chiffre devrait fortement augmenter », [2] a déclaré Nathaniel Dyer de Global Witness. « Ce nouveau projet de loi sur le pétrole offre au Congo et à sa population la possibilité de bénéficier de leur industrie pétrolière naissante mais, en son état actuel, celle-ci n’est pas adaptée à l’utilisation prévue. Il est vital d’intégrer dès à présent des garde-fous afin d’empêcher toute corruption dans le secteur. »
Global Witness réclame :
- la suppression de l’article controversé figurant dans le projet de loi qui ouvrirait la porte au forage dans les parcs nationaux et les sites du patrimoine mondial du Congo ;
- l’instauration d’un processus d’appel d’offres ouvert pour l’attribution des droits pétroliers ;
- la publication des noms des propriétaires ou bénéficiaires réels ou « effectifs » des sociétés détenant des droits pétroliers ;
- la publication des contrats pétroliers.
La compagnie pétrolière britannique Soco International a obtenu des droits pour explorer le pétrole dans une zone du nord-est du Congo qui comprend une partie du Parc national des Virunga, classé au patrimoine mondial. Le gouvernement britannique a publié une déclaration en septembre 2012 dans lequel il s’opposait à l’exploration pétrolière dans les Virunga, et des résolutions critiques à l’égard d’une activité d’exploration ont été adoptées par les parlements belge, allemand et européen. [3] Au mois d’août, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a lancé une campagne afin de protéger les Virunga de l’exploration pétrolière. [4]
« Ce projet de loi menace le plus ancien parc national d’Afrique et l’un des derniers habitats du gorille des montagnes au monde », a poursuivi Nathaniel Dyer. « Le projet de loi ne devrait pas être adopté par le Parlement sans consultation. Il est impératif que la loi dispose de solides garde-fous environnementaux et anti-corruption. »
Cela fait quelques années que Global Witness et d’autres organisations font part de leurs graves préoccupations quant à la gestion des ressources naturelles du Congo. L’Africa Progress Panel, présidé par l’ancien Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, estime que l’État congolais a perdu au moins 1,36 milliard $ entre 2010 et 2012 du fait de la sous-évaluation d’actifs miniers vendus aux sociétés offshore. Cela représente près du double des dépenses annuelles du Congo dans les secteurs conjugués de la santé et de l’éducation.
Des accords pétroliers ont déjà été conclus dans des circonstances opaques au Congo ; ils ont d’ailleurs plus d’une fois impliqué les mêmes acteurs que les accords secrets passés dans le secteur minier. Toutes les parties concernées soutiennent ne rien avoir à se reprocher.
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Contacts :
Nathaniel Dyer, +44 (0)20 7492 5855 et +44 (0)77 11 006 799, [email protected]
Colin Robertson, +44(0)20 7492 5862 et +44 (0)7803 605 362, [email protected]
Exclusion de responsabilité : la version française est une traduction du document original en anglais. Cette traduction ne peut être utilisée qu’à titre de référence. En cas de divergence entre la version française et la version originale anglaise, la version anglaise fait foi. Global Witness décline toute responsabilité en cas de dommage ou préjudice causé par des erreurs, des imprécisions ou des incompréhensions de traduction.
Notes à l’attention des équipes de rédaction :
Le projet de loi sur les hydrocarbures devrait être voté par la chambre basse du Parlement, l’Assemblée nationale, lors de sa prochaine session, qui débutera le 15 septembre. Par manque de temps, l’Assemblée nationale n’a pas pu en débattre en plénière lors de sa dernière session qui s’est conclue le 15 juin. Une fois le projet de loi approuvé par l’Assemblée nationale, une commission conjointe des deux chambres du Parlement serait chargée de convenir d’une version commune, après quoi le projet devrait être approuvé par le Président afin de devenir loi.
- L’intitulé complet de la loi pétrolière congolaise est « Proposition de Loi Portant Régime Général des Hydrocarbures ». Pour prendre connaissance des recommandations et de l’analyse de la loi pétrolière congolaise, veuillez consulter : « Recommandations de Global Witness concernant le nouveau code des hydrocarbures de la République démocratique du Congo », octobre 2012 (http://www.globalwitness.org/sites/default/files/library/DRC-GW%20hydrocarbons%20brief%20Oct%2010,%2012-FR_0.pdf) et « La loi sur les hydrocarbures devant le parlement de la RD Congo n’est pas en mesure d’arrêter la corruption ou les dommages environnementaux – Global Witness », mai 2013 (http://www.globalwitness.org/fr/library/la-loi-sur-les-hydrocarbures-devant-le-parlement-de-la-rd-congo-n%E2%80%99est-pas-en-mesure-d).
- D’après les derniers chiffres de l’ITIE ('Initiative pour la Transparence des Industries Extractives) , les compagnies pétrolières en RDC ont signalé avoir versé à l’État congolais plus de 325 millions $ en 2010, soit 43 % de tous les paiements dégagés des industries extractives cette année-là. Ce chiffre devrait connaître une forte hausse au cours des prochaines années en raison de la signature fin 2012 d’un accord entre la RDC et l’Angola visant l’exploitation de gisements pétroliers offshore dans des eaux partagées dans l’Atlantique. Crispin Atama, Ministre congolais des Hydrocarbures, aurait déclaré qu’il souhaite que la production congolaise de pétrole passe de 25 000 à 225 000 barils par jour d’ici 2014.
- Le gouvernement britannique a réaffirmé sa position en août 2013, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères ayant déclaré : « Le Royaume-Uni reste opposé à l’exploration pétrolière dans le Parc national des Virunga, site du patrimoine mondial », http://www.telegraph.co.uk/finance/newsbysector/energy/oilandgas/10268273/SOCO-in-dispute-with-Foreign-Office-over-Britains-stance-on-controversial-DRC-drilling.html. La résolution du Parlement belge a été adoptée le 29 novembre 2012 et peut être consultée à l’adresse suivante : http://www.lachambre.be/FLWB/pdf/53/2350/53K2350011.pdf. La résolution du Parlement européen a été adoptée le 13 novembre 2012 et peut être consultée à l’adresse suivante : http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2012-0511+0+DOC+XML+V0//FR. La résolution du Parlement allemand a été adoptée le 4 juin 2013 et peut être consultée à l’adresse suivante : http://savevirunga.files.wordpress.com/2012/04/german-parliament-motion-eng.pdf. Voir « Virunga: The real price of energy » dans le Energy Post du 2 août 2013 pour de plus amples informations : http://www.energypost.eu/index.php/virunga-the-real-price-of-energy/. Tous les liens étaient actifs au moment de la publication des présentes.
- Pour de plus amples renseignements sur la campagne « Virunga » du WWF, consulter : http://www.wwf.org.uk/how_you_can_help/virunga/