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Global Witness révèle le contenu de permis d’exploration non publiés auparavant
Une compagnie pétrolière cotée au FTSE 250 de Londres, SOCO International, a annoncé ses projets à lancer une campagne d’exploration pétrolière dans le Parc national des Virunga, plus ancien parc national d’Afrique et Site du Patrimoine mondial de l’UNESCO dans la République démocratique du Congo (RDC). Le projet a été annoncé mercredi soir, après que Global Witness ait contacté SOCO pour un droit de réponse.
Deux permis – publiés aujourd´hui par Global Witness – donnant le feu vert à SOCO ont été signés par les ministères congolais des Hydrocarbures et de l’Environnement, en dépit d’un engagement annoncé précédemment par le gouvernement à suspendre toute exploration pétrolière dans le Parc, dans l’attente des résultats d’une Evaluation Environnementale Stratégique. Cette évaluation, financée par l’UE et d’autres donateurs internationaux, devrait être prête fin 2012.
SOCO a déjà rendu publique son intention de procéder à des relevés aériens. Toutefois, les permis étant publiés aujourd’hui semblent donner le feu vert à mener diverses activités d’exploration pétrolière plus larges, y compris des études sismiques. D’après plusieurs sources fiables, SOCO cherche à faire avancer un plan consistant à établir un campement au sein de la communauté de pêcheurs de Nyakakoma, en plein cœur du Parc.
Le Parc national des Virunga est situé dans un écosystème extrêmement vulnérable, au sein duquel le fleuve Congo et le Nil prennent leur source. Il représente un habitat vital pour de nombreuses espèces protégées, y compris des gorilles en danger critique, des hippopotames et des éléphants, et abrite le lac Édouard, qui s’étend sur plus de 2 300 km² et confère leurs moyens de subsistance à quelque 50 000 personnes.
« Le fait d’entreprendre des activités d’exploration ou d’exploitation pétrolière sur le terrain dans un Site du Patrimoine mondial de l’UNESCO constitue une violation de la Convention du Patrimoine mondial, ainsi que des propres législations et à la Constitution de la RDC », a déclaré Colin Robertson de Global Witness. « Les projets de SOCO mettent réellement en danger la faune et la flore des Virunga ainsi que les populations qui dépendent du lac Édouard. La région est par ailleurs en proie à des tensions ethniques et la présence de groupes de milices armées continue de menacer la stabilité. Ces facteurs risquent d’être exacerbés si l’exploration pétrolière se déroule en l’absence de toute consultation de la population locale. »
SOCO a précédemment été accusée par les responsables du Parc d’être entrée dans les Virunga de manière illégale, notamment en février 2011 lorsque des représentants se déplaçant à bord d’un véhicule de SOCO auraient forcé les barrières du Parc. Dans la réponse qu’elle a adressée à Global Witness, SOCO a affirmé que ces accusations étaient « sans fondement » et qu’« aucun membre du personnel de SOCO ni aucun de ses représentants n’ont été impliqués dans un tel incident ».
Répondant à Global Witness, SOCO a déclaré n’avoir pour l’instant mené aucune activité d’exploration et avoir réalisé une étude d’impact social et environnemental. La compagnie a également précisé qu’elle avait obtenu l’autorisation de procéder à des relevés aériens, qui nécessitent le survol du lac Édouard, et que toute activité supplémentaire ne serait menée que sous réserve de l’accord du gouvernement et en consultation avec les parties prenantes. SOCO a également affirmé avoir largement consulté les parties prenantes locales, notamment lors de deux grands ateliers organisés en février 2011, ajoutant que ces efforts de communication au niveau local se poursuivraient.
« SOCO et le gouvernement congolais doivent attendre les résultats de l’évaluation environnementale stratégique avant de prendre des décisions hâtives qui mettront à mal les moyens de subsistance de la population et porteront atteinte à un Site du Patrimoine mondial unique en son genre », a conclu Colin Robertson.
Pour tout renseignement complémentaire, veuillez contacter :
Colin Robertson au +44 (0)7803 605 362 ou au +44(0)207 492 5862
Andrea Pattison au +44 (0)20 7492 5858 ou au +44 (0)7970 103 083
Notes aux équipes de rédaction :
- Les permis publiés aujourd’hui sont disponibles à télécharger ci-dessous.
- Le permis octroyé par le Ministère des hydrocarbures semble donner le feu vert pour toutes les activités d’exploration décrites en détail dans l’Article 8 du Contrat de partage de production pour le Bloc V : http://mines-rdc.cd/fr/documents/Hydro/contrat_rdc_dominion_soco_cohydro.pdf (pages 16 -18).
- L’Ordonnance-Loi de 1969 relative à la conservation de la nature de 1969 et le Code de l’environnement de 2011 interdisent tous les deux les activités d’exploration pétrolière dans les zones protégées. De telles activités portent également atteinte à la Convention du patrimoine mondial que la RDC a ratifiée. L’article 215 de la constitution congolaise stipule que ce type de traités a une autorité supérieure à celle de l’ensemble des lois nationales. Le 8 mars 2012, le ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders a qualifié les récentes autorisations d’exploration de « contraires à la législation congolaise et aux engagements internationaux ».
- L’arrêté signé par le ministère de l’Environnement autorise des relevés « aéromagnétiques et aérogravimétriques » dans le Bloc V. L’arrêté signé par le ministère des Hydrocarbures semble donner à SOCO un feu vert concernant une gamme complète d’activités d’exploration, y compris des tests sismiques sur le terrain.
- Des informations publiques remontant à 2010 indiquent que SOCO International avait signé un contrat couvrant le Bloc V du Rift Albertin. Le Bloc V englobe une partie importante du Parc national des Virunga. SOCO a publié des informations sur ses activités dans le Bloc V : http://www.socointernational.com/csr-virunga_new .
- SOCO détient ses participations en République démocratique du Congo (Congo-Kinshasa) à travers sa filiale détenue à 85 %, SOCO Exploration and Production DRC Sprl (« SOCO E&P DRC »).
- L’UNESCO a également fait part de ses préoccupations quant à cette situation dans un communiqué de presse paru cette semaine : http://whc.unesco.org/en/news/849/