Il convient de saluer l’annonce, la semaine dernière, de la décision tant attendue de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international de renoncer au remboursement de la dette de 12,3 milliards de dollars de la République démocratique du Congo. Cependant, de multiples réformes de développement de la transparence sont requises de toute urgence dans les secteurs minier et pétrolier si l’on veut que le pays bénéficie réellement de cette décision, a déclaré aujourd’hui le groupe de campagne Global Witness.
Le pays a beau afficher une grande richesse en ressources naturelles – bois, minerais et pétrole –, la population congolaise n’en bénéficie aucunement du fait de décennies marquées par une corruption et une mauvaise gestion profondes.
« Le fait que le Congo se voit octroyer un allègement de sa dette au 50ème anniversaire de son indépendance constitue une occasion unique de rompre avec les comportements destructeurs et corrompus du passé », a affirmé Lizzie Parsons, responsable de campagne pour Global Witness. « Toutefois, nous assistons depuis peu à des développements préoccupants dans le secteur des ressources naturelles qui vont à l’encontre du progrès que représente l’octroi d’un allègement de la dette. »
Ces derniers mois, des contrats flous ont été signés dans les secteurs minier et pétrolier lucratifs du Congo, sans être soumis à aucun examen public approfondi. L’identité des propriétaires des sociétés qui ont obtenu le droit d’exploiter des ressources importantes est tenue secrète sous couvert de sociétés étrangères. Le transfert des droits d’exploitation miniers et pétroliers sans recourir à un processus d’appel d’offres international manifeste soulève des questions en matière de régularité de la procédure.
Une mystérieuse société enregistrée dans les îles Vierges britanniques, Highwind Properties Ltd, s’est vu octroyer le droit d’exploiter la mine de cuivre de Kingamyambo Musonoi Tailings au Katanga en janvier 2010. On ignore sur quelle base Highwinds a reçu ce droit. La mine avait auparavant appartenu à la société minière canadienne First Quantum Minerals, qui avait investi 750 millions de dollars dans le projet avant que celui-ci soit contraint par le gouvernement de cesser ses activités en septembre 2009 suite à un examen de dizaines de contrats miniers. Quelques mois auparavant, First Quantum avait versé 55 millions de dollars d’impôts – le plus gros paiement fiscal jamais perçu par le gouvernement, d’après le PDG de la société.
Deux compagnies pétrolières jusque-là inconnues, Caprikat Ltd et Foxwhelp Ltd, toutes deux également enregistrées dans les îles Vierges britanniques, ont obtenu les droits relatifs à deux blocs pétroliers pour l’instant inexploités dans le nord-est du Congo, par décret présidentiel promulgué en juin. On ignore selon quels critères les deux compagnies ont été sélectionnées. La décision a été prise alors que le gouvernement avait déjà octroyé ces blocs à d’autres compagnies à de nombreuses reprises, avec des primes de signature totalisant 3 millions de dollars, malgré le fait qu’aucun décret présidentiel ratifiant le précédent octroi des blocs pétroliers n’avait jamais été promulgué. De nombreuses sources signalent que Caprikat et Foxwhelp appartiendraient à un neveu du Président sud-africain Jacob Zuma.
« À l’heure actuelle, les citoyens congolais n’ont aucun moyen de savoir si les transactions conclues par le gouvernement le sont dans l’intérêt réel du pays. Le gouvernement devrait faire savoir sans équivoque quels individus sont impliqués dans les dernières transactions et selon quels critères ils ont été choisis comme partenaires », a ajouté Lizzie Parsons. « La capacité des citoyens à comprendre et à examiner minutieusement les accords est primordiale pour que le pays puisse tourner la page sur son passé. »
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Contact :
Lizzie Parsons (+44 207 492 5865 or +44 7812 072 678) et
Daniel Balint-Kurti (+44 207 492 5872 or +44 7912 517 146)
Notes à l’attention des équipes de rédaction :
1. La République démocratique du Congo est devenue éligible à un allègement de sa dette le 1er juillet 2010 au titre de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés et de l’Initiative d’allègement de la dette multilatérale du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.
2. Une commission sénatoriale congolaise a signalé en 2009 que le pays était passé à côté de 361 millions de dollars de recettes qu’il aurait dû dégager du secteur minier en 2008, et ce, en raison de la mauvaise gestion et de pratiques frauduleuses répandues.