Document d'information / 4 Août 2008

Les informations distillées au compte-gouttes et les tractations douteuses affaiblissent le processus de revisitation des contrats miniers

À la veille du commencement des renégociations promises des contrats miniers en République démocratique du Congo (RDC), des organisations non gouvernementales (ONG) congolaises et internationales appellent aujourd'hui le gouvernement de la RDC à rompre le silence sur cette renégociation des contrats miniers. Le gouvernement n'a fourni aucun calendrier ni critère précis concernant les négociations avec les sociétés minières. Le contenu et la publication des termes de référence, promis par le Vice-Ministre des Mines aux compagnies minières privées, demeurent nébuleux.[i]

"La phase finale de la revisitation des contrats miniers a commencé il y a quatre mois et la société civile est tenue complètement dans l'ignorance de ce qui se passe", a déclaré Jean-Claude Katende, Président de l'organisation congolaise des droits de l'homme ASADHO. « Le gouvernement de la RDC a le devoir d'expliquer au Parlement ce qui se passe étant donné l'importance cruciale des négociations pour la vie et les aspirations du peuple congolais. »

Le manque d'informations actuel contraste avec les déclarations publiques émises presque quotidiennes de Victor Kasongo, le Vice-Ministre des Mines, lors de la Conférence minière qui s'est tenue au Cap en février dernier. Les choses ont été beaucoup plus calmes depuis le mois de mars lorsque le Ministère des Mines a annoncé que les négociations avec les sociétés minières seraient dirigées par une « task force » composée de ministres hauts placés du gouvernement. Les doutes sur l'indépendance et l'efficacité du processus se sont intensifiés à la suite de nouvelles selon lesquelles le gouvernement de la RDC aurait refusé toute offre d'assistance internationale et aurait renoncé aux propositions visant à mettre sur pied un groupe d'experts techniques et juridiques chargé de conseiller la task force.

« Tout le monde n'est pas sur un même pied d'égalité. Le gouvernement de la RDC tente de bloquer certains nouveaux contrats mais en appuie d'autres qui concernent de grandes concessions minières, comme le rachat de la mine de Kamoto par Nikanor », a déclaré Patricia Feeney, la directrice exécutive de RAID.[ii]

Dan Gertler, qui continue de renforcer l'emprise de ses compagnies sur les ressources clés du Katanga, à savoir le cuivre et le cobalt, a annoncé un accord de principe sur l'acquisition d'une participation de 25 pour cent dans Anvil Mining Limited.[iii]

Des groupes de la société civile congolaise et internationale font campagne depuis longtemps pour une renégociation équitable et complète des contrats miniers. En mars 2008, les ONG ont salué la publication du rapport de la Commission mais ont fait part de leur mécontentement face aux retards, aux procédures confuses et au black-out médiatique qui ont sapé la confiance du public dans la renégociation. Plus récemment, la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) a publiquement réaffirmé qu'elle était disposée à prendre part à la Commission de renégociation ad hoc du gouvernement.[iv]

« Dans un esprit d'équité et de responsabilité publique, le transfert des droits miniers devrait être reporté jusqu'à la conclusion du processus d'examen et de renégociation », a souligné Gavin Hayman, le Directeur de campagne de Global Witness. « Comment les Congolais savent-ils qu'ils auront un bon accord ? »

Les ONG ont exhorté le gouvernement congolais à :

  • Expliquer l'évolution des négociations et comment les préoccupations d'intérêt public sont rencontrées ;
  • Publier tous les contrats renégociés ;
  • Confirmer les contrats qui sont annulés à la suite du processus d'examen et expliquer quand et comment l'annulation entre en vigueur ;
  • Faire des efforts supplémentaires pour connaître le point de vue de la société civile et celui des populations locales touchées par des contrats spécifiques dans le cadre du processus de renégociation, compte tenu de leur participation insuffisante au processus d'examen.
  • Faciliter la création d'un organe ad hoc indépendant, composé de représentants de la société civile suffisamment qualifiés, d'avocats indépendants et autres personnes, qui contrôlerait le processus de renégociation et présenterait ouvertement son point de vue et ses recommandations au gouvernement.

Les ONG ont appelé les gouvernements bailleurs de fonds et les organisations intergouvernementales à:

  • Insister auprès du gouvernement de la RDC pour rendre publiques les informations sur le processus de renégociation.
  • Inciter les sociétés minières à clarifier les nouveaux termes qui ont été convenus.

 

Signataires :

11.11.11, ACIDH, ASADHO, Broederlijk Delen, Bukavu Sud Kivu La Commission Environnement, Gouvernance des Ressources Naturelles et Droits des Peuples Autochtones/ Bureau de Coordination de la Société Civile du Sud Kivu, CENADEP Antenne du Kivu, CENADEP, CODELT, Fatal Transactions, Global Witness, Héritiers de la Justice, NDS, OCEAN, Réseau CREF, Reseau Ressources Naturelles, Rights and Accountability in Development.

 

Notes aux éditeurs

Le 20 avril 2007, une commission interministérielle a été créée pour « examiner les contrats de partenariat et leur impact sur le recouvrement de ces entreprises et le développement national, et pour proposer, le cas échéant, les modalités de leur révision en vue de corriger les déséquilibres et les défauts. » (Arrêté ministériel no 2745/cab.min/Mines/01, 20 avril 2007)

La Commission a examiné plus de 60 contrats miniers signés entre des entreprises privées et l'État ou des entreprises d'État. La Commission a clôturé son rapport en octobre 2007. Après un retard de plusieurs mois, le gouvernement a posté le rapport de la commission de révision des contrats miniers sur le site du Ministère des Mines en mars 2008. Le gouvernement a également publié quelques lettres qu'il a adressées à des entreprises présentant les conclusions de l'examen relatif à leurs contrats.

 

Pour tout renseignement complémentaire, veuillez consulter :

Conférence Épiscopale Nationale du Congo, « Appel à la vigilance pour sauvegarder la souveraineté et bâtir notre destinée », 10 juillet 2008

ONG communiqué de presse, « Accueil favorable à la publication du rapport de revisitation des contrats miniers congolais; les renégociations se doivent d'être équitables et transparentes », 25 mars 2008.

Communiqué de presse du gouvernement congolais : « DRC Ministry of Mines publishes full report of the Mining Contracts Revisitation Commission », 20 mars 2008.

Communiqué de presse du gouvernement congolais : « Publication date announced for revisitation commission report on DRC's mining contracts », 18 mars 2008.

Communiqué de presse d'ONG : « L'examen des contrats miniers en RDC : filière rapide ou fausse piste ? Le gouvernement congolais doit clarifier le processus d'examen afin de restaurer la confiance », 18 février 2008.

Communiqué de presse d'ONG : « Les ONG s'inquiètent du « détournement » dont fait l'objet le processus d'examen des contrats miniers en RDC », 4 février 2008.

Communiqué de presse d'ONG : « Appel international pour la publication du rapport final de la Commission ministérielle chargée de la revisitation des contrats miniers en RDC », 7 novembre 2007.

Rapport de Global Witness : « Le secteur minier congolais à la croisée des chemins », 1er octobre 2007.

« Rapport du groupe d'experts du Forum de la Société Civile sur 12 contrats miniers », août 2007.

Rights and Accountability in Development : « Key mining contracts in Katanga: the economic argument for renegotiation » (Principaux contrats miniers au Katanga : l'argument économique en faveur d'une renégociation), avril 2007.

 


[i] Franz Wild, « Congo Mining Deal Negotiations to Start Aug. 5, RTNC Reports », Bloomberg, 29 juillet 2008.

[ii] M. Kabwelulu, Ministre des Mines, a déclaré que « le Gouvernement congolais salue la fusion... » dans Robin Pargamenta, « Nikanor and Katanga Mining merge to create $3.3bn African giant », The Times, 7 novembre 2007. « Les responsables de la RDC ont été tenus au courant de l'éventuelle fusion et ont exprimé leur soutien », dans Katanga Mining Limited et Nikanor PLC, « Recommended Merger of Katanga and Nikanor to Create a Leading African Copper and Cobalt Company », 6 novembre 2007.

[iii] The Canadian Press, « Family trust to buy 25 per cent stake in Anvil Mining for C$296 million cash », 10 juillet 2008.

[iv] Conférence Épiscopale Nationale du Congo, « Appel à la vigilance pour sauvegarder la souveraineté et bâtir notre destinée », 10 juillet 2008.